Monographies
Yves Jeanmougin
Mulhouse
« Portraits » d’une
ville
Éditions La Filature,
1994
En décembre 1992, François Verret, chorégraphe et
réalisateur de films documentaires, est invité par
Christopher Crimes, directeur de La Filature, à porter son
regard sur les populations mulhousiennes qui, a priori, ne
se sentent pas concernées par cet équipement.
François Verret choisit d’associer à sa démarche un
photographe, Yves Jeanmougin. Pendant un an, François
Verret et Yves Jeanmougin se dédient ensemble à cette
« enquête sociale ». Ils explorent la ville de
Mulhouse, ils rencontrent des « gens
ordinaires », des gens dont habituellement on parle
peu, ou pas, des « gens simples » qui, le plus
souvent, vivent dans l’ombre, aboutissant à la réalisation
d’un film et de ce livre :
Mulhouse, « portraits » d’une ville.
Ces portraits nous révèlent alors l’identité profonde de
Mulhouse, ville ouvrière, ville pluriculturelle, ville
misère aussi… Mulhouse est certainement bien autre chose,
mais elle est aussi tout cela. Le travail de Yves
Jeanmougin est un regard porté sur notre époque, marquée
par une très grande instabilité sociale et économique. Ce
livre est dédié à ceux et celles qui l’ont généreusement
accueilli et ont permis que ce travail se réalise.
Yves Jeanmougin
Le Temps
d’un regard
Le Fresnoy 1992
Édisud,
1993
Pendant de longues années, Le Fresnoy, gigantesque centre
de loisirs créé près des manufactures textiles de Lille au
début du XXe siècle, fut un authentique lieu
d’expression de la culture populaire. Il offrait à un prix
modique, à beaucoup de gens issus des classes populaires,
un « certain usage du temps libre ».
Fermé au début des années 1980, Le Fresnoy hante
encore les souvenirs de beaucoup de ceux qui l’ont connu.
Serait-il possible aujourd’hui d’inventer des lieux
analogues à ce Fresnoy d’antan, et répondant aux besoins de
notre époque ?
Ouvrage réalisé dans le cadre d’une « mission de
sensibilisation des publics à la création » de
François Verret en région Nord-Pas-de-Calais en 1992.
Yves Jeanmougin
Marseille /
Marseilles
Éditions
Parenthèses, 1992
Textes Franco Beltrametti, Julien Blaine, Moncef
Ghachem, Gérard Guégan, Michéa Jacobi, Manuel de Lope,
Jean-Pierre Ostende, Leïla Sebbar, Ousmane Sembene
Les images publiées aujourd’hui appartiennent à un ensemble
de photographies réalisées au cours d’un long reportage sur
les différentes communautés de Marseille. Ce travail,
initié en 1981 en collaboration avec la sociologue Chantal
Balez, s’est poursuivi jusqu’en 1990.
Ces « photos de famille », qui lèvent le voile
sur l’aujourd’hui de la ville, ont requis une profonde
complicité des personnages :
la plupart des clichés sont d’abord des photographies
posées. C’est là le résultat d’un minutieux travail
d’approche, d’« apprentissage » des modèles,
d’exploration et de compréhension des différentes manières
d’être communautaires. Car Yves Jeanmougin photographie dès
lors que ses « sujets » sont en parfaite
sympathie avec son projet, qu’ils y adhèrent et y
participent. C’est ainsi que les intérieurs, les
« décors » sont volontairement mais pudiquement
révélés et qu’ils pointent une réalité marseillaise
profondément ancrée au-delà des images de quartiers
traditionnellement marqués, au fil de l’histoire, d’une
présence migratoire.
Si les destins individuels percent parfois les portraits,
il convenait en outre de fixer les manifestations visibles
par lesquelles les groupes demeurent attachés à leur pays
d’origine et de repérer ces signes d’appartenance
collective qui réactivent la cohésion sociale, et que
multiplient ces moments privilégiés à cet égard :
fêtes religieuses, baptême, mariage ou décès, rituels,
commémorations, rencontres festives, folklore parfois… Et
si ces images semblent rebelles au discours, elles offrent
leur richesse documentaire pour écrire, peut-être, ces
histoires de vie qui font, elles aussi, l’Histoire.
Marseille (Marseilles), mémoire de traversée, d’éphémère,
de migrances, de départs et d’arrivées, de rejets,
d’aversion, d’amour déraisonnable, conforte ici son mythe
exemplaire. Marseille n’est pas une fenêtre ;
elle est un miroir qui tend son opacité à tous ces
impérialismes – l’oppression et la caricature – qui la
nourrissent, car elle sait que son exultation reste
inaccessible à l’autre, à l’indigène.
Anne-Marie Lapillonne
Dominique Delgado, Yves Jeanmougin
Belsunce
Mémoires d’hier et d’aujourd’hui
Édisud, 1989
Lorsqu’en 1986 l’ASPA (Accueil services personnes âgées)
effectua une enquête auprès des personnes âgées du quartier
Belsunce pour s’assurer de la pertinence de ses projets, ce
fut toute une réalité oubliée qui apparut et s’imposa à
nous. Cette réalité prenait appui sur un passé dont nous
savions peu de choses et qui cependant agissait encore
comme un élément dynamique dans le quotidien de nos
interlocuteurs.
Aujourd’hui, avec ce livre, voici le quartier raconté par
ses plus vieux habitants, et certains clichés tombent
d’eux-mêmes. Avoir pu donner la parole à ceux qui, du fait
des mutations sociales, sont exclus des circuits
économiques, politiques et médiatiques, pouvoir partager
ces témoignages vivants et chaleureux, nous rappelle à quel
point nous sommes tributaires d’un passé, d’une histoire,
et qu’à l’ignorer, c’est nous-mêmes que nous amputons d’une
part essentielle de notre devenir.
Vidéo-Un
Yves Jeanmougin
Photographies
Nuit Blanche, 1984
Étonné à la première page, flatté dès la seconde, puis
aussitôt conquis et heureux que le rythme ne faiblisse pas.
Aussi galvaudé que le mot puisse paraître, il s’impose pour
Yves Jeanmougin :
talent. Talent de glaner des instants forts, d’être au
rendez-vous de l’humain, de chroniquer la vie des petites
gens de Marseille ou d’ailleurs sans basculer dans le
pathos lacrymal. Yves Jeanmougin est le photographe de la
« marge » plus que des marginaux, terme
aujourd’hui trop dévoyé. C’est un des rares photographes
sociaux qui sache éviter et le misérabilisme et le
« j’accuse » véhément.
Qu’il cadre le dénuement, la pauvreté et c’est la joie
qu’il photographie comme s’il portait en lui d’inépuisables
réserves de tendresse qui auraient toujours le dernier mot.
Son sujet « les enfants hors la loi du
travail » ?
Refusé parce que « mes gosses avaient l’air trop
heureux de travailler ». Les Gitans et les Arabes des
cités de transit de Marseille ?
Ils sourient, font la fête, se marient. Le quart
monde ?
Plus vivant et déluré que souffreteux. Pourtant, ses images
percutent quand même, et d’autant mieux qu’elles ne
fonctionnent pas dans la dénonciation, le procès, mais
dressent un constat que chacun peut déchiffrer sous son
propre prisme.
Et avec ça, une démarche de puriste :
Jeanmougin a passé une semaine avec une éclusière de
Bourgogne pour ramener un portrait d’une âpre beauté qui
résume à lui seul la rigueur du photographe et l’âme du
modèle.
in Photo Reporter n° 76, février 1985
Yves Jeanmougin, Chantal Balez
Nous les
femmes
Contrejour, 1980
Ces photos ont été réalisées par Yves Jeanmougin au cours
de différents reportages… Je les ai détournées de leur
premier sens pour en jalonner l’histoire de la famille des
femmes racontée par « je ». Quand je parle et
agis, quand je lutte et accepte, je suis, de la grand-mère
à la petite-fille, toutes ces femmes… Bien que et parce que
photographiées par un homme, elles sont comme autant de
fragments de miroir dans lesquels, moi l’une aux multiples
facettes, je me reconnais…
J’étais ma grand-mère…